Les Z’éléphs à Bisanne 2024 raconté par Gaël
L’hiver chez nous n’est jamais très propice aux cross et aux compétitions de vitesse, mais c’est l’occasion de se replonger dans ce que d’autres ont vécu au cours de l’année passée !
Gaël nous propose un beau résumé d’une compétition qui a eu lieu à Bisanne en avril 2024. Ils étaient plusieurs Z’éléphs à vouloir se tester là bas, et voici leur histoire…
13 Avril 2024 – Bisanne – Manche 1
Tous les signaux sont au vert pour cette première manche de l’année dans les Alpes du Nord. 90 pilotes, 30°C, une organisation bien rodée, et surtout pas un souffle de vent, contrairement aux 20 derniers jours. Mais comme dans toutes les compétitions, on commence par trois heures d’attente : confirmation des inscriptions, briefing, café, et re-café. Tout ça avant même d’envisager de monter au décollage. C’est ma première manche en 13 ans, et j’avais oublié ces petites longueurs.
Midi, nous arrivons au décollage, un site privé exceptionnellement ouvert pour la compétition. Attention, interdiction formelle d’y décoller en temps normal. La masse d’air peine encore à s’activer. Le directeur de la compétition et le comité des pilotes nous annoncent une manche en « Temps minimum », aussi appelée « Temps mini » ou « Contre-la-montre ». L’objectif est d’éparpiller les pilotes sur le parcours pour éviter de grosses grappes dans des thermiques au plafond bas. C’est assez rare, alors autant expliquer rapidement le principe.
La plupart des compétitions de distance fonctionnent comme une course au but, un peu à la manière des départs en masse au biathlon ou des étapes classiques du Tour de France : tout le monde part en même temps, et le premier arrivé (ou celui qui va le plus loin) gagne. En temps mini, c’est différent : chaque pilote vole contre la montre, et le meilleur temps sur le parcours l’emporte.

Plusieurs stratégies commencent à se dessiner. La masse d’air s’instabilisant doucement, partir tard semble judicieux : les pilotes devant nous baliseront l’espace de vol, facilitant la lecture du parcours. Mais nous sommes en avril, les journées sont courtes. Partir trop tard, c’est risquer de lutter contre un soleil déclinant et des conditions qui s’adoucissent. À l’inverse, partir tôt permet d’éviter les brises qui pourraient ralentir les pilotes sur certaines sections. Chacun devra faire son choix.
La manche mesure 39,928 km, un tour de vallée avec atterrissage à Beaufort et vent dans le dos sur la dernière ligne droite. Une branche le long des faces nord enneigées m’inquiète un peu : il faudra peut-être prévoir un détour pour éviter des zones délicates.

En temps mini, le départ est flexible : « Start quand on veut ». Pas de pression au décollage, il suffit de respecter la fenêtre de départ. Je prends mon temps et à 14h50, je suis en l’air. La masse d’air s’est légèrement activée. Je planifie un départ au milieu de la fenêtre. Finalement, les conditions sont moins stables que prévu : de beaux thermiques se forment, et les premiers pilotes franchissent le start dès 15h. J’enroule un dernier thermique au niveau du décollage avec Benjamin, puis nous nous dirigeons ensemble vers le start, que nous passons avant de nous arrêter dans un thermique puissant quelques centaines de mètres plus loin pour reprendre de l’altitude.
Une fois en haut de ce thermique, je fonce directement vers la première balise, B1. Benjamin et Maxim, que nous avons rejoints dans ce thermique, sont plus malins que moi. Profitant de la proximité du thermique avec le start, ils font un aller-retour rapide pour revalider leur départ. En temps mini, c’est le dernier passage du start qui compte. Ce détail m’était complètement sorti de la tête, mais pas à eux, et cela paiera pour Maxim à la fin de la manche.
Le reste de la course est assez simple : enchaîner les thermiques en évitant de perdre trop d’altitude. Les deux dernières branches, cependant, sont les plus longues. D’abord, il faut remonter de la montagne d’Outray vers Queige, face à la brise. En naviguant bien sur la face sud de Bisanne, je me repositionne et valide la dernière balise avant de faire demi-tour vers le goal, à l’atterro de Beaufort. La dernière portion est une longue branche vent arrière. J’ai suffisamment de hauteur pour accélérer et gagner du temps. Je mène mon petit groupe vers le goal, survolant une dizaine de pilotes trop gourmands (dont Célestin), qui ont posé à quelques mètres seulement du but, après avoir passer la limite de l’ESS.
Et voici les résultats de la manche pour les quelques pilotes que je connais plus ou moins bien, pardon d’avance si j’en ai oublié :
Maxim Hayes – 4ème
Gaël Parent – 9ème
Alexandre Laurent – 22ème
Benjamin Clais – 26ème (6ème Sport)
Frédéric Zmokly – 33ème (11ème Sport)
François Rigot – 45ème (18ème Sport)
Célestin Sagot – 52ème
Benoit Spoerry – 61ème (26ème Sport)Voici une animation de nos différentes traces, dont l’heure de start a été recalée simultanément afin de comprendre comment certains ont pu faire la différence sur certaines portions. Gardez bien à l’esprit que dans la réalité, nous ne sommes pas tous partis en même temps.
14 Avril 2024 – Bisanne – Manche 2
Nous sommes de retour pour une deuxième journée, et cette fois, les conditions s’annoncent plus instables que la veille. Les organisateurs nous proposent une manche de 44 km, en course au but, ce qui ravit la plupart des pilotes. Le parcours prévoit un aller-retour vers le massif des Aravis, avec un goal en altitude, au col des Saisies, pour éviter les mésaventures d’hier où plusieurs pilotes avaient dû poser à quelques mètres du goal après avoir passé l’ESS (End of Speed Section, la fin du chrono).

Mais comme la veille, les thermiques peinent à se former. Le premier ouvreur termine au sol sans avoir trouvé la moindre ascendance, forçant les organisateurs à retarder le start. Heureusement, les ouvreurs suivants finissent par dénicher des thermiques, et la course peut enfin débuter. Très vite, tout le monde se retrouve dans un large thermique au-dessus de la montagne de Bisanne. Le start s’annonce massif, avec un départ groupé… sauf pour moi. Je me retrouve en bas du paquet, obligé de passer en mode survie dès la première balise. Pas la meilleure situation, mais ce handicap jouera finalement en ma faveur.
La première partie de la manche est un aller-retour le long des crêtes beaufortines, conçu pour disperser un peu les pilotes. Rapidement, un groupe de tête se forme et se lance dans la longue transition vers les Aravis, plus précisément la Tête du Torraz. Je débute cette traversée environ 10 à 15 minutes plus tard, après avoir pris soin de bien faire le plein d’altitude. Une décision sage : de l’autre côté, tout change. Non seulement on passe dans un autre massif, mais aussi dans une aérologie bien différente.
La Tête de Torraz est balayée par un mélange de brises remontant le val d’Arly et de vent météo, avec des rafales de 20 à 30 km/h. Ces conditions rendent les extractions extrêmement difficiles. Le changement de rythme est brutal, et le groupe de tête explose. Certains favoris posent après avoir cliqué la balise de Megève. Les pilotes suivants, prévenus par cette hécatombe, abordent cette section avec plus de prudence, mais il est déjà trop tard pour rattraper les premiers, qui creusent leur avance.
Je prends la transition avec précaution, restant haut et terminant chaque thermique en tenant compte du vent. Je me repositionne constamment au vent des reliefs pour passer les balises B4, B5 et B6 sans encombre, même si parfois, je frôle les cimes en franchissant les crêtes. Sur cette partie du parcours, j’ai vu une trentaine de pilotes poser, et ma priorité est désormais claire : boucler la manche coûte que coûte.
Avec un petit groupe de “survivants”, nous nous accrochons à l’espoir d’un thermique suffisamment puissant pour nous extraire et nous permettre de rentrer dans le Beaufortain. Finalement, nous trouvons l’ascendance nécessaire et entamons le retour. Il reste encore B7 à franchir avant de viser le goal, mais le vent s’invite à nouveau, compliquant les extractions en basse couche.
Je prends un pari différent des autres pilotes que j’ai rejoint à la raccroche, en m’enfonçant dans le massif plutôt que de suivre les avant-reliefs. Cette décision paie : un énorme thermique me propulse suffisamment haut pour aborder la dernière ligne droite. JE mets les poulies en contact et fonce vers le goal, que je franchis en 15ème position, environ 30 minutes après les leaders.

La casse est lourde aujourd’hui : sur 101 pilotes, seuls 30 atteignent le goal, la majorité des autres ayant succombé aux pièges du vent. Une manche intense, où la prudence a clairement été la clé pour arriver au bout.
Célestin Sagot – 14ème
Gaël Parent – 15ème
Maxim Hayes – 52ème
Frédéric Zmokly – 54ème (11ème Sport)
François Rigot – 61ème ex-aequo (26ème Sport ex-aequo)
Benoit Spoerry – 61ème ex-aequo (26ème Sport ex-aequo)
Benjamin Clais – 71ème (35ème Sport)
Alexandre Laurent – 73èmeLes traces du deuxième jour sont dispos ici !
Résultats généraux :
Gaël Parent – 9ème
Maxim Hayes – 28ème
Célestin Sagot – 29ème
Alexandre Laurent – 42ème
Benjamin Clais – 43ème (14ème sport)
Frédéric Zmokly – 48ème (16ème sport
François Rigot – 55ème (21ème sport)
Benoit Spoerry – 64ème (27ème)
Bravo à eux pour leur classement, et un grand merci à Gaël d’avoir pris le temps de rédiger ce petit récit, c’est super de partager ces moments avec tous !